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Révision solvabilité 2 en 2020

L’introduction de la directive Solvabilité II au 1er janvier 2016 a constitué une étape importante dans la détermination d’un modèle de supervision et de gestion des risques plus sophistiqué et affiné dans le secteur de l’assurance. En effet, les trois piliers ont permis de renforcer la stabilité financière avec une meilleure gouvernance et une meilleure adéquation entre le capital et les risques encourus des assureurs, en fixant les modalités de détermination des fonds propres et l’exigence en capital (Pilier 1), en élaborant les règles qualitatives et la gouvernance de la gestion des risques (Pilier 2) et en déterminant les exigences de communication financière au superviseur et au marché (Pilier 3).

En revanche, ce régime prudentiel n’est pas sans contrainte pour les assureurs, et est évolutif afin de corriger certaines limites des défauts existants et tenir compte de l’expérience de ces trois années d’application. En effet, afin de répondre aux préoccupations des assureurs, des revues ont été réalisées (en 2017/2018) par le législateur qui a décidé d’ouvrir certains points qui font l’objet de discussion. La prochaine revue du régime est prévue en 2020.

La révision solvabilité ii en 2020

La nouvelle révision de Solvabilité. II aura lieu en 2020, la Commission Européenne a publié une demande d’avis à l’EIOPA, attendue pour Juin 2020 dont l’objectif est d’aboutir à une proposition législative pour la fin de l’année 2020. Dans ce contexte, l’EIOPA a lancé le 15 octobre 2019 une consultation publique visant à collecter les avis du marché et des autorités de contrôle nationales. 19 sujets sont ouverts dans cette consultation, que nous pouvons re- grouper sous trois thématiques :

  • Les garanties branches longues et les mesures du risque action,
  • L’introduction de nouveaux outils Solvabilité II sur les enjeux macro-prudentiels, sur les régimes de rétablissement et de résolution, et sur les schémas de garantie d’assurance,
  • La révision du cadre actuel Solvabilité II basée sur l’expérience de ces trois années pour améliorer l’application de ses exigences en termes de fonds propres, exigences en capital et reporting.

Les autres sujets ouverts

Les provisions techniques : l’EIO-PA élabore des propositions de revue de la définition des frontières des contrats (fréquence de l’évaluation des frontières des contrats, l’horizon de projection, précision sur les notions « unbuilding » et « effet discernable),l’intégration des futures décisions de gestion avec l’inclusion des affaires nouvelles, les hypothèses de frais d’investissementet la valorisation des options de garanties.

  • Les exigences minimales de capital (Minimum Capital Requirement – MCR) : sans modifier les niveaux minimums de SCR/ MCR, l’EIOPA propose la mise à pour des facteurs de risque alpha et beta pour les risques d’assurance non-vie. Des propositions sont également exprimées pour s’assurer de la conformité du respect du MCR en amendant l’article 139 et en complétant le dispositif légal de l’article 144 sur les obligations MCR en cas de retrait d’agrément.

  • La simplification du cadre Solvabilité II – Principe de proportionnalité : Les seuils d’application Solvabilité II sont également revus par l’EIOPA qui propose de passer de 5M€ à 25M€ de primes brutes émises et de doubler le montant de provisions techniques de 25M€ à 50M€. De plus, l’EIOPA encourage le principe de « proportionnalité » avec des reportings allégés et des exigences moindres pesant sur les activités présentant des risques faibles avec des séries de simplifications sur le Pilier 1 (fonds propres, SCR), le Pilier 2 (exceptions possibles sur la rémunération, ORSA, politiques écrites) et le Pilier 3 (seuils spécifiques de remise pour certains templates, allégement ou suppression de certains templates).

  • Les Fonds propres : la consultation de l’EIOPA porte sur les différences avec les pratiques de réglementation bancaire (approche par niveau et la volatilité engendrée, les critères de disponibilité et d’attribution par niveau) mais l’EIOPA n’a pas soulevé de changement.

  • La supervision des Groupes : l’EIOPA étudie également les Groupe à travers le contrôle (périmètre, transactions intra-groupes et concentration du risque, notion de contrôle), le calcul de la solvabilité (méthode de calcul, fonds propres, minimum SCR du Groupe) et la gouvernance.

  • Les activités transfrontalières Supervision continue : l’EIOPA propose de renforcer le dispositif de coopération entre les autorités de supervision en ajoutant des dispositions d’obligations légales de déclaration à travers l’échange d’information entre Etats dans un délai raisonnable (cas de refus d’agrément, notion d’évolution importante d’activités, d’identification des risques).


  • Les politiques macro-prudentielles – Contrôle du risque systémique : l’EIOPA propose des mesures macro-prudentielles afin d’améliorer le contrôle du risque systémique avec une série de mesures telles que la surcharge en capital liée au risque systémique, un plan de gestion du risque de liquidité, le gel temporaire des rachats, l’élargissement de l’ORSA, un plan de redressement et de résolution préventifs, un plan de gestion du risque systémique.
  • Les mesures de rétablissement/ résolution : l’examen de proposition en vue d’une harmonisation des régimes de rétablissement et résolution en Europe est également en cours par l’EIOPA. En effet, l’EIOPA propose de nouveaux outils de pouvoir de résolution aux autorités, tels que la mise en place de plans préventifs de rétablissement et de résolution, la définition de seuils d’intervention au niveau européen (non-respect du SCR comme seuil d’entrée de rétablissement), la coopération transfrontalière des autorités en scénario de crise.

Les principaux points de la revue 2020 et les impacts attendus pour les assureurs

Le traitement prudentiel des investissements en actions long terme

Impacts attendus : Le calibrage des investissements long terme en fonds propres reste très élevé malgré les avancées de la révision de Solvabilité II en 2018 (création d’une nouvelle classe d’actions long terme « Long Term Equity Investment » bénéficiant d’une charge allégée à 22% contre 39% dans la formule standard dont les conditions d’éligibilité sont jugées trop restrictives. Il est donc nécessaire de réviser à nouveaux les exigences en fonds propres des actions long terme et de relâcher les critères d’éligibilité afin d’encourager les assureurs à adapter l’allocation des actifs en adéquation avec la durée de leurs engagements, nécessaire pour stimuler les rendements, diversifier les portefeuilles d’investissement et financer l’économie réelle.

Consultation EIOPA : L’EIOPA s’est donc positionnée sur certains points du traitement des investissements en actions long terme comme la performance de l’investissement stratégique, la méthode du critère de moindre volatilité, le seuil de détention minimum à 20%, l’analyse des données historiques, les conditions risques. Elle appelle également le marché à donner son avis sur  les modifications requises du traitement du module actuel du risque action.

Le risque de taux en formule standard

Impacts attendus : Dans le modèle actuel, le risque de taux ne prend pas en compte l’hypothèse de taux négatifs or dans l’environnement actuel la possibilité de taux d’intérêt négatif est devenue une réalité qui doit être prise en compte pour mieux mesurer les risques. Une révision du calibrage du risque taux avec de nouvelles hypothèses de chocs de taux à la baisse comme à la hausse est nécessaire, ce qui entrainera probablement une hausse de la charge en capital de plusieurs points de solvabilité aux assureurs.

Consultation EIOPA : l’EIOPA propose de redéfinir les scénarios de collecte de données et les modes de calcul comme elle l’avait proposé lors de la révision en 2018 (modification des chocs à la baisse avec des chocs relatifs par maturité, introduction de chocs additifs et des chocs à la hausse). Concernant les techniques d’atténuation du risque, l’EIOPA n’a pas formulée de proposition mais des questions sont ouvertes dans la consultation publique.

Traitement des garanties long terme

Impacts attendus : Les travaux sur les garanties branches longues ont pour objectif de i) mettre en place des mesures contracycliques pour limiter la volatilité introduite par la valeur de marché en corrigeant les mécanismes de la volatilité (VA- Volatility Adjustment), ii) modifier la courbe des taux en révisant les deux approches de la valeur LLP (Last Liquid Point) et de l’extrapolation fondée sur des « points lissés » et iii) fiabiliser les calculs de provisions techniques avec une meilleure communication des impacts sur les ratios SCR/MCR dans les rapports SFCR.

Consultation EIOPA : l’EIOPA propose de nouvelles approches de calcul de l’ajustement de la volatilité à travers trois aspects que sont : la prise en compte de la liquidité des passifs, la prise en compte des actifs de l’assureur et le déclenchement et calcul de la VA country. Elle préconise le maintien de la VA dynamique et étudie la possibilité de modifier la courbe de taux (LLP et extrapolation) mais l’examen des mesures transitoires n’a pas donné lieu à de nouvelles évolutions.

 

Le calibrage de la marge pour risque

Impacts attendus : Lors de la révision 2018, l’industrie a montré que la marge pour risque pouvait être réduite en toute sécurité et que le mécanisme actuel était pénalisant entrainant un niveau élevé de capital pour faire face aux exigences réglementaires, jugé comme étant des restrictions « inutiles » qui impactent les produits à long terme. De nouvelles attentes ont donc été exprimées pour la révision Solvabilité II en 2020 avec une évolution des modalités de calcul.

Consultation EIOPA : Ainsi, l’EIOPA est consultée dans l’inclusion de risque de marché avec le calibrage de la correction pour volatilité – Volatility Adjustment (VA) et celui de l’ajustement égalisateur – Matching Adjustment (MA) dans le calcul de la marge pour risque avec une revue du « coût du capital » (CoC) et l’opportunité d’utiliser un CoC variable. A ce stade l’EIOPA ne propose aucun changement.

Le renforcement des exigences de reporting et information au marché

Impacts attendus : Des adaptations des exigences de reporting ont également été demandées notamment en fonction de la taille des acteurs. De plus, les évolutions concernent également les format de templates Quantitative Reporting Template (QRT) intégrant de nouveaux types de risques avec la création ou modification de QRT ainsi que les deadlines de soumission au régulateur / marché

Consultation EIOPA : l’EIOPA propose des évolutions dans la création de nouveaux templates et ajout d’information des templates existants (cyber-risque, approche par transparence des fonds d’investissement alternatifs, approche produit par produit, revue des templates transfrontaliers, templates SCR modèle interne, refonte des templates « variation analysis »), révision des fréquences de revues et deadlines des templates, amendement et allègement de template (S.05.02 primes, sinistres, dépenses par pays, S23.02 fonds propres), précisions de templates (S.06.02 actifs financiers / S.32.01 Entreprises dans le périmètre du Groupe, S.33.01 Exigences individuelles relatives aux entreprises d’assurance et réassurance).

Conclusion

Cette révision 2020 bien que très attendue ne constituera pas un changement profond, mais entrainera des évolutions importantes en termes de simplification du cadre Solvabilité, qui se voudra plus robuste et plus fiable avec des règles qui permettront aux assureurs d’améliorer les calculs des exigences prudentielles et améliorer la qualité des données. Aussi, sans doute aura-t-elle un impact direct sur l’allocation des actifs et des offres proposés par les assureurs

Equipe Twobii